C’était le temps des ébats insouciants, des débats enfumés. Soirées enivrées de joutes verbales, de ripaille et de rêves enfantins. Chiner était ma liturgie.
Lorsque je ne jeûnais pas, je dévorais la viande entre deux morceaux de pain et m’avachissais pour digérer des émissions ondines d’un autre siècle. Devant un simple cliché d’actrice, j’étais cocaïnomane. Mes plans sur la comète faisaient long feu lorsque j’avalais mon carburant, un petit noir serré. Mes questionnements restaient sans réponse.
Ma soif de transcendance cohabitait avec ma médiocrité omnipotente, la toute miséricordieuse. Je tentais de pénétrer le spirituel par la grande porte du Swing. Cet ésotérisme de notes bleues et de derviches milesdévissants. J’étais un piètre musicien, un auditeur romantique, tout juste bon à presser la gâchette de ma chaine stéréo.
Je servais du blanc sec à des molluscophiles, des claqueurs de fortune, et me rendais compte que la chemise blanche est le propre de l’homme. Je songeais même à reprendre les études, ce qui finissait toujours par heurter ma virilité. J’écrivais camouflets et nasardes pour me pardonner de vivre comme un bourgeois.
De ma prose naissaient parfois des bouquins. Inspirés de pays où le rhum et les cigares font trembler la voix des hommes comme la Terre. Je dédiais même quelques vers à des financiers qui n’y comprenaient rien. Les femmes me souriaient. Cela me flattait mais ne résolvait rien. Seuls m’apaisaient mes balbutiements fumeux de cavendish en bruyère et quelques mesures de jazz.
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